New York minisiteLorsqu’elle se réveilla au 50e étage d’un gratte-ciel de Manhattan, elle ne fut pas vraiment triste. Elle partit bourrée d’énergie faire la connaissance de son université.

Tout lui était nouveau. Elle se dirigea vers son département, trouva l’amphi et suivit son cours avec un intérêt décuplé par l’amour. À midi, elle descendit dans le parc et s’installa sur un banc. Alors qu’elle sortait un sandwich de son emballage en plastique, elle entendit un jeune homme lui demander s’il pouvait s’asseoir à côté d’elle. Elle acquiesça d’un geste. Elle leva la tête et crut défaillir. C’était lui !

Elle allait se jeter dans ses bras quand elle fut retenue par son attitude, aimable certes, mais indifférente. Serait-il devenu amnésique ? Elle l’examina de plus près. Le jean et la chemisette le rajeunissaient. Ses cheveux longs lui donnaient un petit air à la Bob Dylan. Ses mains fortes et fines tournaient les pages d’un livre. Avec prudence, elle lui en demanda le titre. Il répondit sans se faire prier :

— C’est une communication de la revue Nature, concernant les dernières avancées sur l’optimisation des sols, grâce à un apport hydrique et chimique réduit au minimum.

— Vous êtes ingénieur agronome ?

— Chercheur. Envoyé par mon laboratoire pour participer à une conférence. Et vous ?

— Étudiante. Française. Je viens compléter ma formation par un MBA de gestion. Votre prénom ?

— Angy. Je m’appelle Angy, un diminutif d’Angelo.

— Vous êtes Latino,

— Non, mais ma famille d’origine française remonte aux premières arrivées sur le continent à bord d’un navire espagnol, « l’Angelo ». Après deux siècles en Louisiane, elle s’est installée à Washington plus précisément à Bethesda, à côté d’un important centre de recherche. D’où mon goût pour la biochimie au départ. Et vous ? Comment vous appelez-vous ?

— Je m’appelle Viviane, comme Vivian Leigh, la Scarlett d’Autant en emporte le vent.

— Dites plutôt comme la fée Viviane !

Était-ce son Lancelot ? Elle reconnaissait ses yeux bleus, son attitude à la fois sérieuse et dégagée. De l’allure ! Mais un je ne sais quoi de Yankee l’en différenciait. Une liberté dans ses gestes, une façon de se comporter sans politesse superflue. Elle disposerait de peu de temps pour en avoir le cœur net. Il ne fallait surtout pas qu’ils se perdent de vue. Il n’y songea d’ailleurs pas, car il lui proposa illico pour le weekend une promenade en métro à Coney Island, idée saugrenue qu’elle accepta d’autant plus volontiers qu’un air maritime tempérerait la chaleur de cette fin de juillet.

— Apportez votre maillot de bain !

(à suivre)