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Le lendemain, on apprenait que dans la France entière des jeunes s’étaient mis en colère. Des mairies, des commissariats, des écoles, des centres culturels, des centres commerciaux, des boutiques avaient été attaqués et incendiés à coup de voitures béliers et de mortiers d’artifice. Des centaines de voitures avaient brulé dans les cités. Des dégâts considérables, des centaines de blessés, des centaines d’arrestations. Aux Halles, à deux pas de chez nous, des boutiques avaient été incendiées et pillées. Nous, on a l’habitude !

On a su que dans la matinée aux portes de Paris derrière le quartier de la Défense un policier avait tiré et tué après un refus d’obtempérer un jeune de 17 ans qui roulait sans permis. La vidéo avait été diffusée sur les réseaux sociaux. La famille s’est indignée, les policiers ont été accusés de violence systématique, de racisme. Même M’Bappé, notre footballeur national qualifiant le jeune de cher ange a lancé un message : J’ai mal à ma France. Omar Sy l’acteur des Misérables, un film évoquant les difficultés entre la police et les jeunes de Montfermeil avait déclaré à son tour : Qu’une justice digne de ce nom honore la mémoire de cet enfant.

Et chaque soir, ça recommence sous les yeux médusés du monde entier. Depuis quatre jours, on compte chaque matin les blessés et les interpellations (3200 jusqu’à présent). La moyenne d’âge des manifestants tourne autour de 17 ans. À Pontoise : la maire a entendu une bande de jeunes crier : On va s’la faire ! Elle s’est enfuie dans sa voiture. À L’Haÿ-les-Roses un autre maire a pu sortir de sa maison en flamme en passant par derrière avec son épouse et ses deux jeunes enfants.

Cependant, de jour en jour, de dégradation en dégradation, le discours commence à changer. La police n’est plus systématiquement accusée, on commence à se poser des questions sur la jeunesse et ses rapports avec la société. Manque d’autorité parentale ? Désespérance ? Mal-être ?

Ce sont vos biens que vous détruisez ! a fini par dire M’Bappé.

Ce matin, la grand-mère du jeune homme décédé a pu déclarer que la police était nécessaire.

Comme on est loin de la Russie où deux hommes en civil sonnent à votre porte pour vous envoyer sur une simple parole et sans autre procès pour des années en Sibérie ! Certains comme l’extrême droite ou l’extrême gauche essaient de nous faire croire que démocratie et dictature c’est la même chose.

La nuance n’est pas la règle. On est dans le tout ou rien. On dit oui ou non, comme les clics du numérique, un peu aussi comme les réponses de QCM. On coche des cases. Les jeunes sont comme ci, les vieux sont comme ça, les pauvres comme ci, les riches comme ça, la province comme ci, la ville comme ça, pareil pour le changement climatique. Et on traîne à inventer des solutions de bon sens aux problèmes soulevés.

Pas étonnant que les jeunes ne se sentent pas considérés, eux qui sont dans l’âge de la complexité, plus tout à fait des enfants pas encore adultes. On les attire avec des richesses auxquelles ils n’ont pas accès. Dans leurs ghettos, ils ne perçoivent pas de valeurs vivables et réelles. Ils se sentent rejetés, dévalorisés, discriminés, d’autant plus que le quotidien de leur vie est jalonné de contrôles d’identité, de poursuites, comme un perpétuel jeu du chat et de la souris avec la police, laquelle, souvent issue des mêmes quartiers se fustige peut-être ainsi de ses propres origines et de sa couleur de peau.  

Heureusement que les forces de vie ont des ressources insoupçonnées, et qu’un nombre non négligeable de ces jeunes issus de l’émigration sortent des cités et accèdent à la classe moyenne. Il ne faut cependant pas trop tirer sur la corde… Le monde est devenu si fragile, à la merci de la technologie, d’un incident nucléaire, d’une manipulation informatique et j’en passe. Les profiteurs sont à l’affut pour s’emparer de tout ce qui peut leur tomber sous la main. Profiteurs de pouvoir, profiteurs de richesses. Tous prêts à tirer profit du mécontentement, de la détresse et de la peur provoqués par ces agissements.

Les jeunes ont-ils vraiment l’opportunité de faire leur apprentissage alors qu’ils restent de plus en plus longtemps dans l’enfance, s’isolent dans leurs quartiers ? Pour nombre d’entre eux, ils ont des moyens d’adultes et des comportements immatures. Il en résulte ces mouvements très certainement attisés par les mafias de la drogue, ces destructions qui coûtent des sommes faramineuses à la nation et qui réduisent à néant les efforts d’éducation, de soin de tant de personnes de bonne volonté.

Sarkozy a dramatiquement supprimé la police de proximité qui cherchait à établir un lien avec la population, les institutions associatives et les municipalités. Il a aussi contraint la police des stupéfiants à faire du chiffre, réduisant à néant la traque patiente des gros bonnets de la drogue. On le paie aujourd’hui très cher.

Il faudra pourtant bien repartir en tirant des leçons de ces événements pour éviter qu’ils se reproduisent. Qui a dit que la vie est un éternel recommencement ?