En raison du confinement, nous n’avions pas pu venir comme chaque année à Pâques, ni durant les grands week-ends de mai et de juin, et le jardin était en friche. Heureusement, par deux fois notre voisin Marcel l’avait fauché comme il avait pu, mais les allées disparaissaient sous les herbes. Vous n’imaginez pas combien un si petit jardin demande d’efforts pour que les rosiers, le plant de pivoines, les œillets de poète, les anémones du Japon n’étouffent pas sous l’herbe à chat, le plantain, le lierre et j’en passe…

Nous nous y sommes mis avec une assiduité décuplée par l’inaction des deux mois d’immobilité forcée. Une fin de printemps pluvieuse avait été bénéfique au rosier de Monique, au rosier grimpant, couvert de boutons. Les agapanthes n’avaient pas trop souffert, mais les feuliles du lilas se recroquevillaient dangereusement,  il fallut d’urgence le décharger de ses innombrables fleurs montées en graines. Je l’ai d’autant plus bichonné que Jacqueline, la femme de Marcel, nous en avait envoyé une photo (ci-dessus) quand nous nous languissions à Paris, parcs fermés et laissés à l’abandon. Il nous avait ravis à distance, rayon de soleil dans notre univers de bitume. Je lui devais bien ça.

Il fallut racler, arracher, tailler, se rendre plusieurs fois à la décharge avant de pouvoir replacer les tables, le fauteuil de jardin et les parasols. L’espace semble agrandi depuis que Gilles a sacrifié plusieurs  branches du prunus et du figuier. Si on la laissait faire, la nature aurait vite fait de vous chasser de chez vous.

Maintenant nous pouvons recevoir nos amis pour des repas en plein air, condition nécessaire pour éviter la contagion.

Heureusement, un temps chaud et clair nous a permis d’aller nous baigner au Léman, la frontière suisse s’étant rouverte le 15 juin. Quel plaisir de nager dans une eau fraîche et dynamique, d’aller ensuite déguster une glace faite maison à la buvette du port ! Mais je crois que cette année nous mettrons un peu plus de temps à nous réinstaller. Dans les magasins en ville, les masques et  le lavage des mains au gel hydroalcoolique ne sont pas aussi systématiques qu’à Paris, mais nous préférons nous y astreindre. Avec les voisins, nous obéissons aux gestes barrières. L’autre jour au milieu de la rue, nous formions une ronde avec l’impression d’être retournés à l’école.

Et comme toujours, le Jura déroule ses crêtes, comme indifférent à l’agitation de la plaine. Pourtant, je remarque que les hêtres remplacent de plus en plus les sapins sur la pente sud. On a tendance à croire la nature immuable. C’est une illusion, elle est fragile !