Philomuses, déc 17. jpg.Ces temps-ci, tout bruit me semble vacarme. Rien que l’idée d’être présente sur les Champs-Élysées avec les centaines de motards accompagnant la dépouille de Johnny Halliday me torture. J’apprécie pourtant le rockeur et sa vitalité, mais  je préfère murmurer « que je t’aime » plutôt que le crier à grand renfort de décibels.  C’est pourquoi le programme de cette soirée m’a tenté, flûte, musique française, Debussy, Ravel, Fauré, avec l’espoir de renouer avec le plaisir de l’écoute.

Chantal nous présente les deux jeunes femmes. La flûtiste Raquele Magalhaes a enregistré des CD, mais on comprend surtout qu’après des études brillantes elle s’est consacrée à ses enfants.  Petite, brune, simplement vêtue, elle sourit avec modestie.  Presque l’antithèse de la plasticienne. La pianiste est son amie.  «Elles aiment jouer ensemble.» prévient Chantal.

Et c’est un régal, sur une trame d’André Jolivet, une succession de délicatesse, de finesse, de sentiments à la fois forts et retenus. Elles me font apprécier Jolivet, retrouvant dans ses broderies sonores les cascades perlées de Schubert, dans ses rythmes les souplesses de Fauré. Main tendue à travers les âges, la flûtiste joue avec simplicité. Le son est juste, posé, sans pathos. Elle joue des airs célèbres en les rafraîchissant. Il y avait  longtemps que je n’avais pas été aussi émue.

Entre deux morceaux, elle explique ses choix, son itinéraire. On comprend qu’elle n’est pas un poussin de la dernière couvée. Elle évoque Jean-Pierre Rampal, un maître qu’elle n’a pas connu, mais qu’elle a beaucoup écouté. Et cela me rappelle une anecdote.

J’avais une vingtaine d’années, nous étions allés dans sa loge après un concert. Je me souviens d’un homme de haute taille, assez volumineux. Il m’avait complimenté et avait retenu ma main dans la sienne. Parlerait-on aujourd’hui de harcèlement sexuel  ? Je dois dire que j’en fus plutôt fière. À cette époque, j’écoutais en boucle son concerto pour flûte de Mozart et je n’imaginais pas que ma modeste personne puisse l’intéresser le moins du monde. Sa flûte était en or !

(à suivre)