Tout autre chose !

Après deux jours seule, sans Gilles, parti pour jouer les Suppliantes à Argenton, Noé et Bastien sont arrivés avec leurs dix-huit ans pleins d’avenir.

Mes deux jours de solitude se sont écoulés, paisibles, à petite vitesse. J’ai installé mon atelier, j’ai déambulé le long de la promenade aménagée par la commune sur l’ancien tracé du chemin de fer Bellegarde-Divonne. Silence, méditation devant les crêtes du Jura.

Toujours pas de pluie. Quelques nuages d’orages secs. Un été bien étrange. Les champs sont jaunes, les jardins potagers vides, des feuilles mortes jonchent la chaussée. On n’avait jamais connu pareille sécheresse.

Aux actualités, les problèmes agricoles ont remplacé le Covid et la guerre en Ukraine. Conséquence d’une année agitée, l’inflation galope. On nous promet des restrictions de chauffage pour cet hiver, difficile d’y penser quand la canicule sévit depuis plusieurs semaines.

Ce fut un plaisir dans ce contexte un peu morose de voir débarquer les garçons du car.

Ils avaient déjà programmé leurs journées et dès le lendemain, après un plongeon matinal dans un lac agité par la bise, ils sont allés en autobus visiter Genève et le musée horloger de Patek et Philippe. Il faut dire que Bastien est passionné par la technologie et veut devenir ingénieur. Au retour, il a dit :

— Tous ces rouages sont véritablement incroyables, si petits et si nombreux. Sont-ils fabriqués à la main ou moulés ?

Je n’ai pu que lui répondre :

—  On voit parfois à la télévision des horlogers, les coudes posés sur une table haute, des lunettes spéciales sur le visage, saisir et placer dans la coquille de la montre de minuscules éléments avec des pincettes. Comment peut-on faire des choses pareilles ?

Bastien resta songeur, imaginant peut-être déjà de nouvelles techniques.

Au retour, ils se sont mis à la cuisine. Crumble de ratatouille, légumes finement coupés et cuits à très petit feu, fondant dans la bouche. Et le soir, Noé nous a pilés au scrabble. Il faut dire qu’il y joue tout le temps sur son mobile.

Le lendemain et le surlendemain, ils sont montés dans le Jura. Six et sept heures de randonnée. Des réservoirs en plastique placés dans leurs sacs à dos sont reliés à un tuyau qui leur permet d’aspirer l’eau sans avoir à sortir la gourde et à dévisser le bouchon. Malin !

Chaque soir, ils ont encore cuisiné : galets bretons, crêpes…. Leur amitié fait plaisir à voir. Gilles est revenu d’Argenton et leur vitalité réjouit nos vieux jours sans nous fatiguer.

Demain matin, ils vont élaguer le prunus, tailler la haie de troènes et répandre le nouveau gravier sur le textile qui empêche les mauvaises herbes de pousser.

Demain après-midi, nous avons l’intention de traverser le Léman en bateau à roues pour faire un tour en Savoie. Une nouvelle aventure !

Et je peins… À peine le temps d’aller vers vous, chère lectrice, cher lecteur, dont je ne sais à peu près rien, mais qui comptez beaucoup pour moi !