Sous une tente abritée du soleil, à deux pas des volailles et des cochons, plusieurs dizaines de paysans, casquettes sur la tête discutaient de leurs productions, des prix, des soucis communs, des bonnes histoires de l’été, avec passion mais sans effusions. Visages longs ou ronds, sérieux ou rieurs, nez et bouches aux formes marquées, corps râblés ou longilignes, droits ou voutés, ils échappaient avec truculence à l’uniformisation citadine.
A cette heure, les manèges ne fonctionnaient pas encore. Les structures restaient suspendues dans le ciel comme de gigantesques répliques de ces robots intergalactiques qui inondent les rayons des jouets. Elles avaient aussi des points communs avec les énormes machines agricoles hérissées de bras et pourvues de cabines transparentes autour desquels tournaient de jeunes agriculteurs sérieux et attentifs. Le contraste de ces machines ultra modernes avec les poules caquetantes et les cochons avachis avait quelque chose de surréaliste.
C’est en revenant vers la ville que nous avons pris conscience de la fragilité d’un monde paysan autrefois assuré de la puissance de ses racines, aujourd’hui soumis à la mondialisation. Était-ce par une volonté des organisateurs de la foire, les stands périphériques proposaient davantage de produits asiatiques manufacturés. Beaucoup étaient tenus par des Pakistanais. Encore plus loin, les étalages de nourriture et les odeurs d’épices orientales n’avaient plus grand-chose de commun avec les produits de nos montagnes. Ils débordaient de loukoums et de beignets. S’y pressaient des femmes corpulentes et voilées, des enfants frisés et joueurs, des jeunes femmes aux yeux charbonneux et des jeunes gens bruns et musclés.
(à suivre)
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