Nous avions rendez-vous avec Caroline place Colette, devant la Comédie française pour dîner ensemble au restaurant. Une longue conversation téléphonique avec Anny-Claude m’avait mise en retard. Ces temps-ci la température fluctue beaucoup. J’avais vite enfilé une veste un peu chaude et glissé mon portable dans la poche.
Il dépassait un peu. Tout le monde connait cette vague impression de faire une erreur.
Nous avons déboulé sur le terre-plein et y avons retrouvé Caroline. Il nous fallait chercher un restaurant. Anny-Claude m’avait conseillé une terrasse rue Saint Honoré. Au moment de traverser l’avenue de l’Opéra, constatant combien l’endroit était bruyant, nous avons rebroussé chemin. Des camions de télévision encombraient les abords de la Comédie française et le public arrivait à flot pour la séance de vingt heures. Nous sommes retournés vers le jardin. Arrivés aux colonnes de Buren, machinalement, j’ai mis ma main dans la poche. Mon téléphone avait disparu !
Vous connaissez ! On perd tout en une seconde. Ses adresses de téléphone et de mail, ses photos. Impressions de mini naufrage.
Nous avons refait le trajet. Les techniciens de la télévision se sont mis en quatre pour nous aider, mais c’était sans espoir. Gilles au milieu des colonnes, dans le décor de Charade, le fameux film policier avec Audrey Hepburn revu récemment à la télévision, a appelé l’opérateur pour bloquer l’appareil.
Nous avons tout de même pu dîner agréablement au Villalys. Une joyeuse tablée de jeunes, probablement une promotion d’étudiants, nous a fait changer de place et c’est un peu plus loin avec leurs rires en arrière-plan et la sérénité du jardin du Palais-Royal que j’ai pu retrouver mes esprits et relativiser une perte, finalement toute relative, puisque des sauvegardes avaient été réalisées peu de temps auparavant. Mes photos de travail avaient miraculeusement échappé à l’incident ! Merci à Caro qui nous invitait d’avoir su prendre l’évènement avec philosophie et gentillesse !
Le lendemain, je suis allée faire une déclaration de perte au commissariat.
Un chantier le remplaçait ! Retour à la maison. Un méli-mélo d’informations notait des commissariats loin de chez nous. Un site très mal fait indiquait un poste de police à deux pas, dans le bâtiment refait à neuf de la grande poste. Tout de même, nous l’aurions su ! Le lendemain en allant faire les courses, Gilles est allé voir. Oui, il y avait bien là un bureau de police et qui pouvait même enregistrer le vol.
J’y ai couru. C’est ainsi qu’évitant les interminables attentes propres à ce genre de démarches, le commissaire de police m’a prise en charge. Grand, brun, visage charpenté, un peu sévère, il boitait légèrement. Séquelles d’intervention ? Ses collègues l’appelaient Marco. Il a d’abord blagué :
— Impossible de recevoir votre déposition. On est en grève !
— Comme d’habitude ! ai-je répondu.
Il m’a introduite dans son bureau et devant son clavier, il a posé les questions d’usage : vol à la tire, lieu du vol, numéro du portable…
— Un roman, lui ai-je dit.
— Pas vraiment, a-t-il répondu.
— Les romans ne se terminent pas tous bien ! Surtout les romans policiers.
Il a vaguement souri tout en se battant avec son ordinateur qui ne voulait pas envoyer la déposition par Internet. Il a fini par l’imprimer avec les plus grandes difficultés. Je lui ai demandé :
— Depuis combien de temps ce commissariat est-il ouvert ?
— Depuis vendredi dernier.
On était mercredi !
De retour à la maison, le téléphone a sonné. C’était le commissaire qui m’annonçait fort gentiment qu’il avait enfin pu m’envoyer la déclaration par internet. Je l’ai abondamment remercié.
Il portait une bague ornée d’une croix de Lorraine. En hommage à la Résistance ?
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