Elle paraissait préoccupée. Son visage maquillé, fond de teint appuyé, joues rougies, yeux et lèvres peintes, faux cils interminables, contrastaient avec son dos blanc, un peu granuleux. Du chignon classique ne sortaient ni perles, ni tulle. Elle marchait vite et la traîne glissait sur le sol, récoltant tout ce qu’une nuit parisienne pouvait y avoir abandonné. Elle finit par rejoindre un photographe. Plutôt laid et râblé, asiatique lui-aussi, il écouta avec une attention indifférente les ordres de la jeune femme qui s’empara enfin de la traîne et l’enroula autour de son bras, insensible aux dégâts qui avaient fané le satin et auréolé les plis. Le haut de la robe de location n’avait guère de grâce et le bas évoquait plutôt une serpillière. Je me dis qu’ils comptaient sur Photoshop pour transformer cette parodie de bonheur en une toilette de lumière destinée à faire des envieux, mais comme j’arrivais à destination, je n’en sus pas davantage.
Il se trouve que quelques jours plus tard, nous sortions du théâtre de la Huchette après avoir applaudi une pièce évoquant le désastre d’un mariage à Athènes. Les touristes se mélangeaient à un nombre impressionnant de jeunes débordant des bars un verre à la main. Nous étions parvenus à en écarter quelques uns lorsque la foule se fendit en deux comme par miracle pour laisser passer un couple de mariés.
La jeune fille brune et grande, lumineuse glissait comme dans une nef nuptiale au bras d’un jeune homme un peu effaré, en jaquette grise, perle sur la cravate de soie, haut de forme sur la tête. Il paraissait un peu pâlichon à côté de sa princesse, revêtue de dentelle, un flot de tulle s’échappant d’un chignon torsadé.
(à suivre)
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