Semaine médicale. Un nouveau torticolis m’a menée d’un cabinet à l’autre. J’ai continué chez d’autres praticiens, afin d’honorer des rendez-vous parfois pris de longue date.
J’en suis sortie avec des ordonnances diverses, dont une prescription de kiné. Quand on vieillit, la santé n’est plus automatique. Il faut prendre soin de soi, éviter les gestes brutaux, surveiller des symptômes qu’on négligeait auparavant. La fatigue, signe de surmenage ou d’avertissement ? La douleur musculaire, à traiter par des mouvements appropriés ou par le mépris ? Et toujours cette vague crainte de la tuile qui peut vous tomber sur le dos sous forme de maladie invalidante.
Au cours du temps, j’ai vu évoluer la pratique des médecins. Autrefois, à peine passés la porte, vous étiez dépossédés de votre corps. Une fois qu’il avait écouté vos glouglous dans son stéthoscope ou scruté vos tympans, lui seul avait le droit à la parole. Des mots succincts précédaient un gribouillis que le pharmacien déchiffrait ensuite avec la plus grande difficulté. L’art du médecin s’apparentait à celui du vétérinaire, à la prescience du médium, fort d’une expérience basée sur l’observation et la palpation.
Aujourd’hui, ils vous envoient faire des radios, des analyses dont vous lisez en clair les résultats et l’estimation de leurs pathologies, ce qui était inconcevable quand le patient devait être tenu le plus longtemps possible dans l’ignorance de son état, éventuel casse-pieds susceptible d’encombrer la route vers la guérison.
Désormais, les médecins vous laissent la plupart du temps participer aux diagnostics et aux choix des traitements. Pour ma part, je préfère les façons de faire d’aujourd’hui. Mais la sécurité sociale pourra-t-elle toujours supporter le coût de ces innombrables examens ?
Quand l’interminable liste des analyses ne révèle aucune anomalie repérée par le gras des caractères, je jubile. Le moindre résultat échappant à la fourchette tolérée me remplit d’un désarroi de même intensité. Mais il me faut assumer, et je peux en parler à mon médecin.
Ce qui reste inchangé, c’est la douleur qui vous fait vous tortiller, l’angoisse, le besoin de réconfort. Il est par ailleurs de plus en plus difficile de trouver un praticien disponible dans l’urgence.
Le mieux c’est de n’être pas malade !
Naturellement, j’ai raté plusieurs événements dont je me réjouissais. En particulier, un exposé à l’ENS par la conservatrice du musée de Nogent-sur-Seine sur la correspondance de Camille Claudel.
Par chance, bien que handicapée par une claudication intempestive, j’ai pu traverser le Pont Neuf pour aller écouter Chantal Stigliani et Anatole Lieberman jouer les sonates de Brahms et de Chostakovitch, pour piano et violoncelle.
Une bonne soirée ! Ils sont tous deux tellement en harmonie. Vive et colorée, la sonate de Chostakovitch m’a remis un peu le moral en place. Et puis, j’ai pu retrouver Éric et Tania Heidsieck que je n’avais pas vus depuis longtemps. On projette de nouveau de se rencontrer à l’atelier. J’y ai si souvent écouté Éric !
Nous avons souhaité l’anniversaire d’Anatole dans la joie, en laissant de côté toute amertume. Juif et russe, il n’a pas boudé son plaisir en dépit des circonstances actuelles.
Aujourd’hui dimanche, marche contre l’antisémitisme. Pour le moment, pas de perturbations à Paris.
Et puis, la joie de revoir Barbara ! Partie hier de Ferrare, elle fait escale à Paris dans son petit appartement de Belleville. Mercredi, elle s’envolera vers San Francisco pour passer deux mois chez Roger et Sally. Nous avions tant de choses à nous dire ! Des nouvelles de chacun, les aventures de sa fille, ses projets. Nous nous connaissons depuis plus d’un demi-siècle et les années ne font que bonifier notre amitié.
Une fois de plus, je suis épatée par la vitalité américaine. En montant ses escaliers, encombrée de son chat et de ses bagages, elle s’est froissé un muscle dans le dos. Après une nuit douloureuse, elle a pris un taxi pour venir nous voir, sans se plaindre et refusant toute aide !
Elle craint que le volcan qui menace en Islande ne l’empêche de partir.
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