L’homme réagit enfin, il balbutia :
– Le métro est à tout le monde !
– Il y a de la place. Je vous ai parlé poliment, madame a été polie.
L’homme se mura de nouveau dans son silence et ne poussa pas son bras .
– Puisque c’est comme ça, je vais vous casser la figure…, dit le jeune homme sur un ton tranquille qui ne laissait aucun doute sur ses intentions.
Les usagers du métro commençaient à s’intéresser à nous. On sentait qu’ils ne verraient pas véritablement d’inconvénient à assister à une remise en place du goujat. Pour ma part, je ne désirais guère servir de prétexte à un pugilat. Mon imagination voyait déjà une scène de bagarre du genre d’Alamo, le western que j’avais regardé la veille à la télévision.
Il n’en fut rien, le personnage descendit à la station Concorde. Et tous de nous sourire. J’ai demandé à mon chevalier servant :
– Vous lui auriez vraiment cassé la figure ?
Il me répondit :
– Je savais qu’il fuirait. Seul un lâche peut s’attaquer à une femme …
Il hésita une seconde et je complétai : « de mon âge… ». Il approuva d’un sourire, comme si je n’étais pas si vieille que ça. Il ajoutait le tact à la bravoure. J’en fus émue.
Nous avons démarré une petite conversation concernant les lignes de métro plus ou moins bondées. Le dialogue devint général et cette bonne humeur, bien parisienne quoiqu’en disent les grincheux, unissait avec plaisir les passagers de la 8. Comme par une ultime complicité, nous sommes descendus tous les deux à la station Richelieu-Drouot. J’ai encore la sensation de sa main ferme et bienveillante lorsque nous nous sommes dit adieu. Il était décidément très beau !
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