Métro Ligne 4 Unsa RATP - Unsa-Ratp

J’avais quitté l’atelier plus tôt pour aller chez le dentiste. D’habitude je m’y rends à pied, mais fatiguée, en retard, j’avais pris le métro ce jour-là. Une seule station entre La Motte-Picquet et Ségur, un peu longue. Le métro s’arrête.

Une jeune fille me cède sa place, je lui dis :

— Merci, c’est gentil, je suis fatiguée. En plus, je suis en retard.

Elle compatit en hochant la tête.

Au bout d’un moment qui m’a semblé très long, car je sais mon dentiste à cheval sur l’horaire, le silence est rompu par la voix du chef de train :

— Veuillez nous excuser, le courant a été coupé en raison de personnes sur la voie.

C’est assez fréquent et la jeune fille me dit :

— Comment est-ce possible ? C’est terriblement dangereux !

La voix résonne à nouveau :

— Deux jeunes filles ont traversé les voies pour aller sur l’autre quai.

D’habitude, on ne nous donne pas tous ces détails. Misogynie ?  

— J’ai un rendez-vous de dentiste. J’étais en retard, mais maintenant j’ai une bonne excuse.

Elle rit :

— Vous ne pouviez pas en avoir de meilleure !

— Si ! Elles auraient pu mourir !

En connaisseuse, elle conclut :

— Nous serions restés bloqués pendant des heures et vous auriez raté votre rendez-vous.

Finalement, le métro est reparti et mon excuse a permis au dentiste et à son assistance d’épiloguer sur l’inconséquence actuelle.

Le soir même, je suis contrainte par la saturation de la ligne 8 de passer par Odéon (il y a de quoi s’inquièter pour les Jeux olympiques de cet été !)

Ligne 4, automatique. Le métro ne repart pas. Devant moi, une femme décide d’attendre le prochain sur le quai. Les minutes défilent, elle me regarde avec insistance, je suis un peu gênée.

Touriste, la soixantaine, blonde et plantureuse, probablement une américaine ou une nordique, elle bredouille quelque chose avec un sourire :

— …. elle !

Je lui fais signe que je ne comprends pas et je détourne le regard. Elle se tait. Le temps s’éternisant, elle dessine un geste de la main et reprend aussi distinctement que possible en me regardant de la tête aux pieds :

— Vous êtes belle !

Que répondre ? Je lui dis :

— Merci !

Je dois montrer un visage ahuri, car elle ajoute avec un fort accent :

— Moi aussi, belle !

Elle dirige un index vers elle-même.

Elle rit, moi aussi.

La sonnerie retentit, la porte se ferme et le métro s’ébranle vers Saint-Michel.