• Retour sur septembre, la foire de Crête (suite 3)

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    mdr-blog-20161227Sous une tente abritée du soleil, à deux pas des volailles et des cochons, plusieurs dizaines de paysans, casquettes sur la tête discutaient de leurs productions, des prix, des soucis communs, des bonnes histoires de l’été, avec passion mais sans effusions. Visages longs ou ronds, sérieux ou rieurs, nez et bouches aux formes marquées, corps râblés ou longilignes, droits ou voutés, ils échappaient avec truculence à l’uniformisation citadine.
    A cette heure, les manèges ne fonctionnaient pas encore. Les structures restaient suspendues dans le ciel comme de gigantesques répliques de ces robots intergalactiques qui inondent les rayons des jouets. Elles avaient aussi des points communs avec les énormes machines agricoles hérissées de bras et pourvues de cabines transparentes autour desquels tournaient de jeunes agriculteurs sérieux et attentifs. Le contraste de ces machines ultra modernes avec les poules caquetantes et les cochons avachis avait quelque chose de surréaliste.
    C’est en revenant vers la ville que nous avons pris conscience de la fragilité d’un monde paysan autrefois assuré de la puissance de ses racines, aujourd’hui soumis à la mondialisation. Était-ce par une volonté des organisateurs de la foire, les stands périphériques proposaient davantage de produits asiatiques manufacturés. Beaucoup étaient tenus par des Pakistanais. Encore plus loin, les étalages de nourriture et les odeurs d’épices orientales n’avaient plus grand-chose de commun avec les produits de nos montagnes. Ils débordaient de loukoums et de beignets. S’y pressaient des femmes corpulentes et voilées, des enfants frisés et joueurs, des jeunes femmes aux yeux charbonneux et des jeunes gens bruns et musclés.
    (à suivre)

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  • Retour sur septembre, la foire de Crête (suite 2)

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    mdr-blog-20161220Nous avons obéi à la tradition qui veut qu’on se disperse pour déambuler dans la foire en toute indépendance. Nous nous sommes donc laissé couler dans le flot. Sous les tentes colorées ou à même le sol sur des tréteaux s’étalaient des objets hétéroclites le plus souvent destinés aux paysans de la montagne. Difficile de deviner l’usage de certains ustensiles, de certaines machines !  Leur point commun ? Une solidité à toute épreuve, pas de chichis, pas de plastique, mais du bois et de l’acier pour les couteaux, de la corde de chanvre, du fer galvanisé haute qualité, tout à l’avenant. Les marchands ne faisaient pas l’article, ils n’en avaient pas besoin. Le produit parlait pour eux. Nous en avons profité pour acquérir deux couteaux de cuisine, les nôtres, vieux de cinquante ans avaient tendance à branler du manche.
    Entre les stands d’outils, les quincailleries et les selleries, des queues se formaient autour des produits fermiers. Nous nous sommes arrêtés devant des saucisses sèches provenant de Morzine. Pour un prix  modique, nous en avons acheté un assortiment : aux noix, au thym, fumées, nature… En prime, une belle jeune femme nous offrit des « grelots », petites saucisses en chapelet, en s’exclamant :
    – … Et ce n’est pas de la gnognote !
    Nous avons continué notre errance. Nous sommes passés devant les cages à poules. Poules à houppettes, grosses boules de plumes ou naines, à cous nus, plumes aux pattes. Pas si chères que ça ! Chacun peut s’en offrir.
    – On dit qu’elles font office aujourd’hui d’animaux de compagnie dans les appartements, commenta Gilles.
    Je me souvenais des poules du fond du jardin de mon enfance. On ne crachait pas sur leurs œufs, mais on se gardait bien d’entrer dans le poulailler qui empestait.
    Des porcelets tétaient goulûment leur mère. Il me sembla en voir davantage que de tétines. Je cherchai à les compter, mais ils se bousculaient trop. La mère s’était assoupie.
    (à suivre)

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • Retour sur septembre, la foire de Crête

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    mdr-blog-20121213Vous voulez acheter une vache ? Il vous la faut de caractère paisible, mamelles volumineuses et abondamment veinées,  ses pis ne doivent surtout pas traîner par terre. Ne pas négliger leur forme afin qu’ils soient adaptés à votre machine à traire.
    Vous apprendrez ces finesses à la foire de Crête. Notre amie Marie nous avait invités à participer à ce cérémonial. Depuis mon enfance, j’ai entendu parler de la foire « sur » Crète, devenue au fil du temps la foire « de » Crète, foire millénaire sur les hauteurs de Thonon. Elle draine l’arrière-pays savoyard, les vallées de Morzine et d’Abondance.
    La foire a lieu le premier week-end de septembre, et chaque année par tradition Marie va s’y plonger avec des amis, et chaque année ils se retrouvent ensuite dans son jardin pour en déguster les produits.  Nous avions été invités à nous joindre à ces Savoyards pur jus. Il y avait lieu d’en être flattés.
    Marie nous avait prévenus qu’il était impossible de se garer en ville tant la foire attirait de chalands. Des amis nous ont prêté leur jardin et c’est donc à pied que nous sommes allés retrouver par la passerelle au dessus de la gare  la petite bande réunie comme chaque année sur la terrasse des Trois Marronniers. Nous étions en retard mais ils n’étaient pas encore partis. Sous un soleil de plomb, le cercle s’est élargi, les têtes fragiles sous les parasols, les autres protégés par leurs lunettes. Ce fut des revoyures à n’en plus finir. On se saluait, on demandait des nouvelles de tous et de chacun. La foire unissait ce petit monde dans la bonne humeur. L’un d’eux, Valère Novarina, dramaturge reconnu, spécialiste des vocabulaires locaux, visage soucieux sous un large chapeau semblait déjà à sa table de travail.
    (à suivre)

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • La régate des vieux gréements (suite et fin)

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    mdr-regate-blog-20161206Le vent de côté était favorable à un départ tranquille, sans changement de bord devant la ligne.
    De catégorie en catégorie, on vit s’élancer les plus grands voiliers. Les équipages assis côte à côte, jambes pendantes à l’extérieur pour faire contrepoids comme des hirondelles sur leur fil. Il est vrai que le vent avait forci et que nous commencions à balancer sérieusement. Les bateaux ressemblaient maintenant à de grands fauves se ruant vers le large dans des gerbes d’embruns qui brillaient au soleil. Quand nous avons quitté le golfe, notre vedette s’est cabrée et nous avons essuyé un paquet de mer qui nous fit refluer, trempés vers l’arrière.
    — Évitez de charger l’avant, nous conseilla le guide
    Il nous montra la bouée du large que les premiers avaient déjà contournée et nous donna encore quelques leçons de stratégie, un voilier ayant essayé de déventer celui qui le précédait. Nous serions restés des heures à regarder, à l’écouter, à méditer devant les éléments, mais sans prévenir la vedette fit demi-tour. Il était temps de rentrer, le départ avait tardé, elle était attendue pour ses navettes habituelles. Le guide, de cette voix de navigateur un peu traînante, s’excusa du calme de la course.
    — J’espère que cette ballade vous aura fait plaisir et que nous nous reverrons l’année prochaine.
    Aux réactions de l’entourage, nous avons compris que la plupart des passagers avaient quelques liens avec la régate, certains y avaient autrefois participé et ce pèlerinage leur tenait à cœur. Ils seraient au rendez-vous !
    La vedette nous a lâchés sur le quai de Saint-Tropez. Quand nous avons retraversé la baie vers Port Grimaud les voiliers n’étaient plus que des petites virgules au large. Nous avons trouvé un restaurant de plage et c’est au soleil que nous avons déjeuné en oubliant le temps moins clément de Paris.
    Merci à toi Philippe pour cette belle journée !
    Fin

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • La régate des vieux gréements (suite 1)

    mdr-regate-blog-20161130Des grappes de costauds tiraient sur les drisses. Chaque équipage avait sa couleur, vert émeraude, bleu outremer, rouge vermillon, couleurs qui mettaient en valeur leur cohésion.
    Notre vedette s’approcha encore des bateaux. C’était merveille de voir les coques fendre l’eau. Tout autour les voiles tendues glissaient dans le ciel comme une nuée de gigantesques papillons.
    Nous avons longé un des plus grands. Une trentaine de malabars se recueillaient en silence, le regard dans le vide après avoir serré les toiles, lové les drisses, préparé les écoutes. L’un d’eux, peut-être plus costaud, en tout cas plus barbu sembla sortir de sa méditation, ses yeux se fixèrent sur nous. Il se leva avec la lenteur caractéristique des marins, et dressé sur ses jambes, insensible au mouvement du bateau, on l’entendit crier :
    – Maman !
    Juste devant moi, à l’avant de la vedette, une petite dame brune frisée, des lunettes rondes sur le nez, souriait. On leur fit une ovation.
    Le jeune guide en profita pour lancer un hommage au pilote qui savait si bien approcher des voiliers sans les gêner. Ils se connaissaient tous. C’était la fête !
    – Le départ va être donné dans un quart d’heure. Le vent a forci, nous annonça-t-il.
    Le temps d’évoquer les subtilités techniques concernant la ligne de départ et les tactiques pour la franchir, le signal avait été donné et plusieurs bateaux trop pressés avaient dû faire demi-tour.


  • La régate des vieux gréements

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    mdr-regate-blog-20161122Nous avons attendu la vedette devant les terrasses clairsemées de Port-Grimaud, la foule s’étant concentrée à Saint-Tropez. Le soleil chassait peu à peu la fraîcheur de la nuit et cette journée d’automne s’annonçait magnifique.

    Nous avons traversé dans la navette, puis nous sommes montés dans un bateau-promenade pour une croisière de deux heures commentée par les organisateurs de la régate.

    C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés au milieu de la baie, les cheveux au vent, la peau au soleil, entourés d’une centaine de voiliers venus du monde entier. Le pilote se faufilait avec adresse entre les grands yachts qui hissaient les voiles avant le départ de la régate. Au micro, un jeune homme, de toute évidence un « voileux », nous salua avec une sorte de connivence qui nous mit aussitôt dans l’ambiance. Il nous les présenta un à un comme des seigneurs dont il aurait percé les secrets les plus intimes.

    – Celui que vous voyez sur votre gauche a appartenu à John Kennedy. Celui-là sur votre droite au prince Régnier de Monaco. Celui-là dont la bôme dépasse de plus d’un mètre a été construit à la fin du XIXe siècle. La plupart proviennent des chantiers américains.

    Comment ne pas utiliser de superlatifs pour décrire la beauté des coques effilées et puissantes, le satin des bois vernis, l’éclat des cuivres au soleil, la lumineuse harmonie des voiles superposées, la vivacité des focs alignés ? Il régnait sur les bateaux une sorte de gravité qui tenait de l’attente.

    (à suivre)

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • Le Carmel du Reposoir (suite et fin)

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    mdr-carmel-4-20161115J’ai eu quelques difficultés à retrouver mon chemin dans les interminables couloirs. Gilles et mes amis m’attendaient sur les marches du portail d’entrée, manifestement impatients de recueillir mes impressions.
    Je leur ai dit qu’elle ne m’avait pas reconnue. Je m’attendais à des questions sur le parloir, sur ce qu’elle m’avait évoqué de sa vie, mais ce qui leur importa, c’est justement qu’elle ne m’avait pas reconnue. Etonnés qu’elle se soit souvenue de mes frères, ils y trouvèrent des raisons plus ou moins biscornues. Je leur ai dit qu’elle commençait peut-être une maladie d’Alzheimer, mais ils affirmèrent qu’elle avait rejeté certains événements de sa jeunesse et que j’en faisais partie. On ne peut pas dire que cette idée m’était agréable. Je fus contente lorsque la voiture s’ébranla et s’éloignant des vénérables bâtiments, se dirigea vers le col de la Colombière.
    La route à flanc de montagne sortait de la forêt agrippée à la pente pelée. Bernard assis du côté du précipice n’en menait pas large, mais Nelly concentrée conduisait en toute sécurité. Nous sommes parvenus au col encombré par une foule qui contrastait avec les rochers hiératiques et le désert environnants. Agglutinée autour d’une boutique de souvenirs,  l’affluence ne parvenait cependant pas à domestiquer l’univers grandiose de la route partie à la conquête du ciel avant de basculer vers le Grand-Bornand.
    La cousine me trottait dans la tête. Elle atteignait la fin de sa vie dans le dénuement et l’anonymat. Sa vie n’avait été qu’une succession de jours semblables, ponctués par les mêmes offices religieux, entourée des mêmes sœurs durant des décennies. Au milieu de ce paysage somptueux et immémorial, l’individu comptait peu, le temps des hommes semblait une goutte d’eau dans l’univers. Et je ressentis profondément que sa vie possédait une grande part de  vérité.
    Fin

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • Le Carmel du Reposoir (suite 4)

    [et_pb_section admin_label= »section » transparent_background= »off » background_color= »#ffffff » allow_player_pause= »off » inner_shadow= »off » parallax= »off » parallax_method= »off » padding_mobile= »off » make_fullwidth= »off » use_custom_width= »off » width_unit= »on » make_equal= »off » use_custom_gutter= »off » custom_padding= »0px||0px| » custom_padding_phone= »0px|0px|0px|0px » custom_padding_last_edited= »on|phone »][et_pb_row admin_label= »row » make_fullwidth= »on » use_custom_width= »off » width_unit= »on » use_custom_gutter= »on » padding_mobile= »off » allow_player_pause= »off » parallax= »off » parallax_method= »off » make_equal= »off » parallax_1= »off » parallax_method_1= »off » column_padding_mobile= »on » custom_padding= »0px|0px|0px|0px » custom_margin= »|0px||0px » gutter_width= »1″][et_pb_column type= »4_4″][et_pb_text admin_label= »Texte » background_layout= »light » text_orientation= »left » use_border_color= »off » border_color= »#ffffff » border_style= »solid » text_line_height= »1.6em » custom_margin= »15px|0px|0px|0px » custom_padding= »0px||0px| »]

    mdr-carmel_du_reposoir-4Elève brillante, elle avait commencé une licence de mathématiques. Reçue première de la région,  elle avait annoncé à ses parents qu’elle voulait arrêter et faire des études d’infirmière. Dotée d’un fort tempérament, elle avait eu gain de cause. Après une ou deux années de pratique, elle était entrée au Carmel du Reposoir.
    – Tu ne te souviens pas que nous faisions du patin à roulette à côté de chez toi ?
    Les patins à roulettes ont laissé remonter des impressions, car elle me répondit, songeuse :
    – Parfois la chimiothérapie détruit les bons neurones.
    Je lui demandais si ses études d’infirmière lui servaient à quelque chose, elle me répondit comme si la question était accessoire :
    – Nous soignons les plus âgées, ce qui prend beaucoup de temps, mais ne demande pas de connaissances particulières. Quand on m’a appelée, j’étais en train de faire la toilette d’une sœur alitée. D’ailleurs, il faut que j’y retourne.
    Je l’ai un peu retenue, peut-être pour percer l’énigme de la voir si heureuse d’un sort pour le moins austère :
    – Tu as été prieure ?
    – Oh non ! Ce n’est pas du tout mon genre !
    Revenant au présent, elle s’informa un petit rien de curiosité dans la voix :
    – Et le Carmel de Pontoise ? On dit qu’elles vont en partir.
    – Mon frère Marc fait partie de son conseil d’administration, il m’a dit qu’elles veulent partir. La ville est devenue très bruyante!
    Elle eut un sourire simple et heureux. Elle étendit les bras vers les montagnes.
    – Ici, on est bien ! On est près de Dieu !
    Et la cloche a retenti.
    – On t’appelle ! ai-je dit en plaisantant.
    Elle a répondu sérieusement, avant de se lever :
    – Non, mais il faut que je termine la toilette. Ensuite, je vais chanter !
    D’évidence, cette dernière phrase exprimait l’essentiel de sa vie, sa raison d’exister.
    Je l’ai quittée en la remerciant, peut-être un peu trop, car elle n’avait pas demandé de mes nouvelles et ne m’avait pas remerciée de ma présence. Je l’ai vue s’éloigner en clopinant sur sa canne, comme si notre rencontre n’avait été qu’une parenthèse sans grand intérêt.
    (à suivre)

    [/et_pb_text][/et_pb_column][/et_pb_row][/et_pb_section]


  • Le Carmel du Reposoir (suite 3)

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    mdr-carmel_du_reposoir-3Etrange ! Ses parents habitaient près de chez nous et nous allions dans la même école. Nous avions passé de nombreux moments les uns chez les autres. Afin de lui permettre de me situer, après avoir évoqué sa sœur jumelle, je lui demandai des nouvelles de sa famille. Elle me parla longuement des uns et des autres avec précision. Elle n’avait donc pas perdu la tête ! J’essayai d’évoquer la mienne.
    – Tu ne te souviens pas ? Lorsque tu étais infirmière, tu venais prendre des repas chez nous.
    – Oui, je m’en souviens très bien ! Je me souviens de l’oncle François et de la tante Jeanne, mais je ne me souviens pas de toi !
    J’étais d’autant plus surprise qu’à l’époque, de nature pourtant secrète, elle m’avait confié ce sentiment de bonheur, de plénitude qui l’inondait pendant les gardes de nuit à l’hôpital. Elle en aimait surtout le silence. Seule au milieu des malades endormis ou souffrants, elle avait senti monter l’appel de Dieu.
    -Tu n’as jamais regretté ton choix ? ai-je demandé à la vieille femme qui serrait sa canne entre des mains encore belles et fines.
    Elle protesta d’un jet :
    – Ce n’est pas moi qui L’ai choisi, c’est Lui qui m’a choisi !
    Réponse qui me laissa perplexe, elle continua :
    – J’ai fait une leucémie, il y a quelques années. La chimiothérapie a peut-être endommagé mon cerveau ! Mais je me souviens de ta famille.
    Je m’en voulais un peu de rompre le silence qu’elle s’était choisie. Cependant, puisqu’elle avait accepté de me voir je poursuivis et je citai mes nombreux frères et sœurs, en comparant les âges avec les siens. Elle se souvenait de mes frères. Pour une religieuse cloîtrée qui avait fait le vœu de ne pas voir d’autre homme que le médecin de la communauté,  je trouvai cela un peu étrange.
    (à suivre)

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  • Le Carmel du Reposoir (suite 2)

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    La sœur tourière et moi avons gravi toutes les deux un escalier de pierre, en haut duquel nous avons franchi une vaste porte de chêne fermée à clé. Encore quelques couloirs et elle m’introduisit dans une petite pièce dont le fond était fermé par une grille en fer forgé. Derrière la clôture je vis arriver ma cousine clopin clopant vêtue d’une robe de bure noire. Encadrant un visage émacié, quelques rares cheveux blancs dépassaient de sa coiffe de nonne. J’avais quitté une jeune fille athlétique et blonde, je retrouvais une vieille femme chenue.
    Elle me dévisagea avec un sourire que je reconnus aussitôt ; large, découvrant des dents, aujourd’hui abimées. Il avait traversé les décennies et exprimait une telle chaleur que j’en fus touchée.  Je la remerciais de me recevoir après tant d’années. Son sourire s’étira encore et elle répondit :
    – Quel est votre nom ? Je n’ai pas bien entendu.
    La surprise passée, J’ai pensé qu’elle pouvait ne pas reconnaître la petite fille, puis la jeune fille qu’elle avait connue cinquante ans auparavant.
    – Farge.
    – Je ne connais pas.
    – Tu ne te souviens pas de moi, Martine !
    Et je dénouai mes cheveux pour l’aider. Elle me regarda comme si je faisais du striptease. J’en fus un peu gênée.
    – Non, je ne me souviens pas.
    (à suivre)

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