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Du mal à me mettre au clavier. Quarantième jour de léthargie.

J’ai pu aller à l’atelier durant les deux seuls weekends où la ligne 8 a fonctionné. Essayé deux autres fois par la ligne 1 automatique et les bus, mais le retour m’a dissuadée de recommencer. Une foule harassée, à grand-peine contenue par un service de sécurité débordé, se pressait pour attraper les seuls trains ou RER accessibles vers la banlieue. Sans même parler des valises des airbnb que rien n’arrête, mes vieux os n’y auraient pas résisté.

Paris vit au rythme de la grève. Chacun se débrouille. Une nuée de vélos et de trottinettes roule n’importe où. Un flot de piétons exténués glisse le long des trottoirs, déborde sur la chaussée. Les disputes sont fréquentes.

Au fil des jours, une sorte de résignation s’est pourtant installée. On râle moins, Paris vit désormais au ralenti. Un peu comme si on était en état de siège. Chaque matin, on ouvre l’affichage de la RATP qui décide de la journée. On annule des rendez-vous, on se met en mode de videotravail, on se résigne à perdre cinq heures pour aller et revenir du travail. On obéit à l’adversité. Moins de 10 % de grévistes ? On fait avec.

On est habitué. Les gilets jaunes nous ont habitués. Durant plus d’un an, ils ont bloqué la circulation, manifesté, pour certains cassé mobilier urbain et vitrines. Leurs revendications n’ont jamais suscité d’hostilité évidente. Après tout, ils défendaient leur niveau de vie. Ils ont obtenu ce qu’ils voulaient. Aujourd’hui, c’est pareil. Une poignée de cheminots défend ses prérogatives, une retraite privilégiée par rapport au régime général proposé par le gouvernement. C’est normal. La grève se poursuit et peut se poursuivre longtemps, puisque les réseaux sociaux n’y sont pas clairement opposés. Celle de la RATP n’impacte que Paris et la majorité des Français s’en fiche un peu. Aujourd’hui, plus rien n’est difficile, tout est « compliqué », la situation est donc tout simplement compliquée !

Tellement compliquée, qu’en effet, on n’y comprend rien ! À chaque argument, un contre argument. On s’est habitué aux fake news ; après tout, elles transportent des vérités à leur façon. La confusion règne dans une jouissance généralisée. Qu’importe la dette de l’état, qu’importe qui paye, on veut le beurre et l’argent du beurre. Les véritables pauvres n’ont pas droit à la parole, d’ailleurs on ne la leur donne pas. Qu’ils se contentent de vous faire votre toilette lorsque vous êtes à l’hôpital, de nettoyer vos rues, de manier le marteau-piqueur ou de soigner les bêtes pour votre indispensable beefsteak quotidien. Quant aux femmes, normal qu’elles touchent 20 % en moins de salaire, elles sont rarement conductrices de train. Et Paris végète. Son dynamisme en prend un coup. Les commerces périclitent, les restaurants souffrent, nombreuses sont les faillites. Les théâtres se vident.

La grève a pourtant du bon. Elle contraint le gouvernement à éviter de prendre ses décisions dans l’isolement de l’Élysée ou de l’hôtel Matignon. Elle place certains syndicats devant la nécessité de dialoguer. Par rapport aux gilets jaunes, on sent peut-être le « chacun pour soi » perdre du terrain.

Et puis, Paris se met enfin au vélo… !