Événement démesuré qui remplit les stades de dizaines de milliers de supporters surexcités et met des milliards de téléspectateurs en transe. Quand vous lirez ces lignes, tout sera terminé. Pourquoi, cette année, ai-je été aspirée d’abord sur mon Smartphone à l’atelier, puis à la télévision par les matchs de quart de finale sans pouvoir y échapper ? Pourtant, on m’écorcherait vive que je refuserai d’entrer dans un stade bondé.
J’avais deviné le match nul de la France contre l’Argentine à l’atmosphère suspendue qui régnait sur la rue de Montmartre, haut lieu des écrans dans les cafés. Des foules sont agglutinées dedans, dehors, partout et se mettent à crier, gigoter, hurler de joie en cas de victoire. Les motos pétaradent, les voitures klaxonnent dans une liesse qui dépasse tous les bonheurs du monde. Les larmes coulent, les défaites personnelles sont oubliées.
Une heure avant la demi-finale, j’étais dans le métro. Une foule de jeunes débarqués de la banlieue, des milliers de touristes airbnb prenaient d’assaut les rames pour se rendre place de l’Hôtel de Ville ou retrouver des copains. Le conducteur avait probablement reçu des consignes, il exigeait qu’aucun pied ne dépasse de la ligne de sécurité. Nous avons mis quatre fois plus de temps que d’habitude pour atteindre les Halles. Les garçons de café y organisaient des surfaces de fan-clubs et sortaient de longues banquettes sur le trottoir.
J’ai vite acheté de quoi dîner et je me suis installée devant mon téléviseur. Oui, pourquoi ? Ces joueurs sont souvent beaux, font preuve d’une étonnante intelligence tactique, d’une exceptionnelle endurance, d’un sens remarquable du groupe, les différences de couleurs de peau s’estompent. Quand ça rate, ils n’en reprennent pas moins leur course et quand ça marche, but…t.t, ils se sautent dessus s’embrassent avec frénésie. Magnifique ! De quoi retrouver son optimisme vis à vis de l’humanité tout entière, malgré les guerres et leurs atrocités, malgré la misère, la souffrance et le désespoir. Une parenthèse de gloire pour les vainqueurs.
Et pourtant, j’ose avouer que cet immense fourbi me gène. Ce n’est qu’un jeu, juste de quoi mettre un peu d’émotion dans nos vies programmées, alors, pourquoi cette inquiétude ? ..
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