— Reste là, dit-elle, que je désactive l’alarme.
Mais, impatient d’en découvrir davantage et désireux de la prémunir contre un éventuel danger, il passa devant elle et pénétra d’un pas vif dans le vestibule baigné de pénombre. À la seconde même où il posait les pieds sur le carrelage un hurlement retentit, sur une seule note, insistant, lancinant, audible à des lieues à la ronde ! Presque simultanément, une voix tonna au-dessus de sa tête :
— Merci d’entrer votre code ! Je répète : « Veuillez entrer votre code ! »
Il s’arrêta, pétrifié. Viviane le bousculant au passage tapota une petite boite accrochée à côté de la porte en criant :
— C’est une erreur !
— O.K. Bonne nuit ! lui répondit la voix.
Le bruit cessa au grand soulagement du prince. Elle appuya sur un bouton et le vestibule s’illumina comme en plein jour. Elle s’écria indignée :
— Qu’est-ce qui t’a encore pris ?
Le fils du roi pensa qu’un gardien caché dans le plafond avait lancé l’alerte. Méthode à son avis moins efficace que les trompettes des gardes postés sur les remparts. Voyant venir les ennemis de loin, on avait le temps de prendre ses dispositions.
— D’où sors-tu donc ? ajouta-t-elle en l’observant dans la lumière.
Elle le trouva beau. Ses cheveux blonds ondulés et sa frange coupés au carré, très tendance, lui donnaient du caractère. Il avait de l’allure, un maintien de sportif. Elle le jugea intelligent. Il examinait les lieux avec une curiosité exempte de préjugés. Mais surtout, elle lisait dans ses yeux un amour en déshérence désireux d’offrir le meilleur de lui-même. Elle se sentit attirée, prête à fondre dans ses bras, mais elle se secoua :
— Tu n’aurais pas un petit creux ?
Il se demanda de quel creux elle parlait, mais il se tut. Elle l’entraîna dans une petite pièce, blanche du sol au plafond, carrelage, murs, à l’exception de quelques meubles gris clair. Habitué aux pierres ocrées, aux badigeons armoriés, aux tapisseries de feuillage et de fleurs qui couvraient les murs du château royal, au bois de chêne sombre des coffres et des bancs, il se sentit un peu mal à l’aise.
Elle tira une chaise blanche et l’incita à s’asseoir à une table également blanche.
— Et surtout, ne bouge pas !
Poète à ses heures, il écrivait des ballades et des rondeaux qu’il mettait en musique. Il aurait voulu évoquer la démarche décidée et virevoltante de la jeune fille, la décrire ouvrant et fermant les placards d’un pas rapide et léger, comme un oiseau picorant dans des boites magiques, laisser libre cours à son cœur qui bondissait dans sa poitrine. Mais comment décrire en rimes les boutons et les mécaniques enclenchées, quels mots, quelles phrases employer ?
( à suivre)
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