La Coupe de France du Yacht Club de France relancée en 12MJ
La Coupe de France du Yachting Club

La sœur de Jérôme a épousé Jacques Perrin. Par quels concours de circonstance, cette jeune Perrin de bonne famille catholique, élevée à la Légion d’Honneur avait-elle épousé cet acteur et producteur célèbre, beaucoup plus âgé et du même nom qu’elle ? Je n’ai pas cherché à le savoir. Jérôme l’évoquait de temps en temps, pour dire que la vie de sa sœur n’était pas de tout repos car il avait tendance à investir ses biens sur chaque projet. Il leur arrivait de tirer le diable par la queue. Valentine avait hérité d’une élégance naturelle, d’une grande beauté et surtout d’un caractère trempé. Ils ont eu deux enfants, deux garçons. Maxence et Lancelot. Maxence avait joué dans les Choristes qui venait de sortir avec un énorme succès et son grand-père le général nous en avait parlé avec fierté. Ils avaient ainsi pu acheter un château en Normandie, élever et apprivoiser des oies sur leur pelouse pour le film suivant Le Peuple migrateur.

Plus tard, alors que nous fêtions l’anniversaire de Marie-Claude sur une péniche, je me suis trouvée à côté de Jacques Perrin. Il venait de sortir Océan, un film documentaire pour la préservation des mers du globe, lequel avait nécessité des moyens considérables, en particulier un navire aménagé pour des tournages sous les tropiques ou près des pôles. Je lui ai dit :

– Ce qui m’étonne le plus dans votre métier, c’est que vous investissez des fortunes et qu’au final votre sort se joue sur moins de trois semaines !

Il me répondit du tac au tac :

– Sur une seule soirée !

Je compris l’importance de la presse, je devinai le travail qui précédait chaque sortie de film. Je vous ai peut-être déjà raconté cet épisode à l’époque, mais je reste encore époustouflée par un tel sens du risque.

Les discours évoquant Jérôme la semaine dernière insistait sur sa « prodigieuse » capacité d’innovation et d’action. Autour du buffet qui suivit, j’entendis un de ses frères dire :

– Oui, dans la famille, on agit. On n’a pas d’états d’âmes.

En effet, il avait dirigé avec efficacité l’administration générale d’hôpitaux à but non lucratif.

J’ai murmuré :

– Je suis plutôt de ceux qui méditent et se posent beaucoup de question.

J’ai vu Elsa hocher la tête et j’ai pensé à Jérôme, son père. La dernière fois que nous lui avions téléphoné, il était seul sur le chemin de Compostelle. Après sa retraite, il avait fait une licence de théologie. Un cancer de l’œsophage l’a emporté prématurément en trois mois. Quelle tristesse !

La rentrée d’octobre est toujours dense à Paris et nous avons retrouvé beaucoup d’amis à l’occasion de dîners, de concerts. Trop long à raconter. J’aurais voulu m’étendre sur l’anniversaire de Marina, notre amie sicilienne, fêté au Yacht Club de France, avenue Foch, avec des amis du cercle grec de Gilles, des Italiens, dont un ancien diplomate intarissable sur « les années de plomb  et ses rencontres avec François Mitterrand.

Ces jours-ci, à l’occasion du premier anniversaire du massacre du 7 octobre en Israël, les journaux sont remplis des horreurs commises par le Hamas, et la réaction effroyable des Israéliens. Une année d’anéantissement d’une population prisonnière à Gaza. Les récents bombardements sur des civils au Liban, sans plus de lois de guerre, un déni de civilisation. Envois de missiles par l’Iran sur Jérusalem. Engrenage de la violence extrême, comme une métastase de la guerre en Ukraine. Les hommes sont devenus fous.

Daria, bibliothécaire à l’ENS après sa thèse, avait retrouvé Gilles dans la cour des Ernest, pour un spectacle de Pindare. Elle avait demandé à se joindre à la troupe de Démodocos. Mais elle leur a envoyé ce message :

– Je suis désolée, je ne vais pas bien, je suis trop stressée par la situation actuelle. J’espère que vous ne m’en voudrez pas !

Daria est iranienne. Ses parents et sa sœur vivent là-bas.

Comme je discutais avec Ruben, argentin, juif et psychanalyste, il me dit :

– En ce moment, je n’arrive pas à me concentrer. Je pense tout le temps au Proche Orient.

Ils concrétisent à mes yeux les deux factions en présence, bien qu’ils n’en parlent jamais.

Ça me désole.