La tempête souffle.
Le travail d’étanchéité sur notre toiture qui a duré des mois l’année dernière porte ses fruits.
Je pense à ceux qui ont acheté de vieilles maisons en province après le Covid. Cet hiver-là avait été clément, tempéré et ensoleillé. Ils ont trouvé moins cher que dans les grandes villes, plus vaste, avec des pièces séparées adaptées au télétravail. Ils ont profité l’été suivant de leurs jardins, de la nature et des petits oiseaux (ce qu’il en reste !).
Par la suite, les travaux pour l’isolation des murs et des toitures se sont révélés indispensables, l’hiver a précipité une solitude pesante, l’éloignement a contraint à plus de voitures par foyer. Conduite des enfants à l’école, médecins rares, les éternels inconvénients du retour à la nature. Mais aujourd’hui, les entreprises demandent à leurs employés de revenir dans les bureaux, le rendement aurait chuté.
Pour autant, l’expérience demeure intéressante. Avec de la patience, on semble en tirer des leçons, par exemple l’alternance du télétravail et du bureau. Ce sont surtout les villes moyennes qui en ont profité. Par ailleurs les citadins retraités transfuges des grandes villes paraissent s’adapter à la campagne profonde et même y recréer de la vie avec des groupes culturels fonctionnant été comme hiver. On est loin de post mai 68 où les hippies s’installaient au fond du Larzac dans des bergeries pour élever des chèvres.
Pour ma part, l’hiver à la ville me convient (autant que l’été à Tougin). Je reconnais que le métro est bondé, les déplacements souvent pénibles, mais il suffit de descendre l’escalier pour trouver de l’animation, rencontrer un voisin, échanger trois mots. Je me sens privilégiée. Un luxe que les générations suivantes auront peut-être du mal à assurer, tant d’un point de vue économique qu’écologique. J’éprouve de l’admiration pour ceux qui cherchent des solutions afin d’économiser la planète. Une longue histoire qui a débuté dans ma jeunesse, du temps des hippies. Il faudra bien s’y atteler, s’il n’est pas déjà trop tard. Mais personne ne veut en payer le prix.
Le frère de Laure habite avec sa famille à Madrid. Par souci d’écologie, il vient en train à Paris et ne prend jamais l’avion, quelle que soit sa destination en Europe. Sans aller jusque là, nous évitons les voyages lointains. Il est vrai que nous en avons largement profité autrefois. A contrario, la famille du frère de Gilles, enfants et petits-enfants, une vingtaine en tout, s’est réunie ces jours-ci pour les cérémonies de Noël à Saint Pierre de Rome. La note carbone a dû être salée, mais peut-être moins que les innombrables transhumances vers les plages des tropiques qui ont repris depuis le Covid. Comme il est difficile de faire la part des choses entre sobriété et austérité ! Hier, une amie écolo me disait combien elle se réjouissait de partir pour 10 jours à la Martinique, après une année surchargée de travail et de soucis.
Gilles me trouve pessimiste. Peut-être. Mais ce matin encore un article scientifique annonce que les courants atlantiques montrent des signes inquiétants. S’ils changent de trajets, les sécheresses vont succéder aux inondations en Europe avec des tempêtes à la clé.
Pourtant, j’aurai lieu d’être optimiste. De nombreux petits événements m’y encouragent.
Dimanche, Thomas est venu continuer la mise au point de ce site. Ce furent des heures d’un travail fructueux. À 16 ans, il manie les touches du clavier avec dextérité, s’adapte avec le sourire à mes demandes, propose d’heureuses modifications, des simplifications et de nouvelles possibilités. Comme je lui disais que je le trouvais patient. Il me répondit ;
— Patient, moi ? Non, c’est de la passion !
Une après-midi de confiance et de plaisir partagé. Sa jeunesse me vivifiait et je me suis dit qu’il posséderait plus tard cet outil du futur qui me manque, un langage qui lui permettra d’agir en temps voulu.
L’informatique serait seulement un outil. Peut-être. Mais elle guide le monde. Elon Musk, son roi, qui prétend pouvoir coloniser Mars, s’ingère dans les décisions gouvernementales du monde entier. La Russie par le biais d’internet interfère dans les élections. Mes plaisirs leur sont étrangers : ces petits riens que sont un rayon de soleil, un rire soudain, un regard, des souvenirs heureux qui remontent, la satisfaction d’un effort récompensé, l’estime réciproque, le contact d’une peau complice.
Mais voilà, c’est bien l’informatique qui m’offre aujourd’hui le plaisir d’être avec vous, en compagnie de mon petit-fils Thomas.
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