Hier, le soleil illuminait le salon jusqu’au fond du bureau de Gilles. J’ai eu beaucoup de difficulté à m’extirper de ce bien-être hivernal et je suis partie vers l’atelier dans un métro bondé par les courses avant Noël et les touristes. Mal m’en a pris, j’ai saboté un « soleil levant dans la brume », une huile sur carton qui démarrait plutôt bien. Heureusement, ce n’est pas la première fois qu’en cours de route je pense avoir tout raté. Mes premières satisfactions sont souvent de courte durée. Reprenant mon travail, je m’aperçois en général qu’il y a lieu d’élaguer pour dépasser un cap. Dans un sens, c’est frustrant, mais j’aime le risque de l’échec. J’aime aussi reconquérir la surface à peindre et faire ainsi durer le plaisir.
Lobtusobus. Andromaque.
Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle
Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle.
La thèse de Sara à l’ENS, boulevard Jourdan. Photographie et écriture. Thérapie par l’image et reconstruction de soi, dans l’œuvre de quatre écrivains, dont Annie Ernaux et Hervé Guibert. Sujet original et multidisciplinaire. Très bien reçue par les membres du jury (une partie par visioconférence). Ils n’ont pas manqué d’apprécier un travail élaboré durant une pandémie qui a rebuté beaucoup d’étudiants. Comment auraient-ils su que Sara y avait trouvé des avantages ? Combien de fois, ne m’a-t-elle pas envoyé un message exprimant sa joie de se trouver seule dans une bibliothèque jusque tard dans la nuit ? Et maintenant ? Elle espère obtenir un postdoc. Elle a ses chances, étant données la qualité de son travail, sa rigueur, son inventivité naturelle. Iranienne, malgré un parcours universitaire agité, une existence parfois compliquée, elle a tenu bon et trouvé une place active au sein du monde littéraire de l’École Normale Supérieure. Elle est aussi diplômée des Beaux-Arts en Iran. J’aime les personnes qui m’étonnent et me surprennent.
Pour cause de Covid, nous nous sommes retrouvés dehors sur la terrasse, au-dessus de la cité universitaire. La lune brillait derrière un grand peuplier dénudé. Malgré le froid, nous étions heureux d’être réunis autour d’elle et du jury. Bravo Sara ! Désormais, tu disposeras peut-être de plus de temps ! À bientôt !
Une amie proche a failli se faire arnaquer à Genève. Une histoire complètement folle ! Un affreux chantage contre une grosse somme d’argent, avec sa fille en enjeu. Téléphone, stress, taxi vers la banque. Heureusement, malgré son affolement et les injonctions à se taire, elle est parvenue à alerter le banquier qui a fait venir un spécialiste. Les mêmes malfrats avaient déjà soutiré plus de 300 000 francs à des personnes dans des circonstances aussi barbares ! Comme elle a dû avoir peur ! J’espère que les malfaiteurs vont aller croupir le plus longtemps possible en prison pour méditer sur leurs actions. Toutes proportions gardées, cela m’a rappelé comment je me suis laissé embobiner autrefois par un faux vendeur dans la rue. Je n’y avais vu que du feu. Ils sont fins psychologues !
Les enfants et petits-enfants vont arriver quelques jours avant Noël. D’ici là, on peut espérer que les restrictions vont attendre. Le nouveau variant omicron flambe maintenant dans le monde entier. Un reconfinement a été décrété aux Pays-Bas et au Danemark. Pour le moment on n’en sait pas grand-chose, si ce n’est qu’il est beaucoup plus contagieux que le variant delta, contre lequel nous sommes vaccinés trois fois mais qui protège seulement des cas graves. Quand je vois la foule se presser dans le métro et le port défectueux des masques, je me dis qu’il ne va pas régresser spontanément.
Julien dans le TGV à son voisin qui s’entêtait à garder son masque sous le menton :
— Mettez-le donc sur la tête, ça fera le même effet !
L’homme s’est levé de son siège et n’est pas revenu.
Les hôpitaux sont débordés. On espère que ce nouveau variant sera moins virulent, sinon…
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