Retour à Paris.

Après avoir rangé, nettoyé et fermé la maison, nous avons pris le car sous une pluie battante. Voyage dans un TGV vide. Arrivés vers 23 h dans une gare de Lyon fantomatique, nous avons émergé du RER désert sur l’esplanade des Halles. Pas un chat ! Un rat a filé devant nous et s’est glissé sous une grille. Quelques rares clients discutaient aux terrasses des restaurants. Rien à voir avec les nuits parisiennes habituelles. Nous avons traîné notre valise à roulettes le long de la rue du Louvre étrangement silencieuse.

Mais le lendemain, la vie avait repris, certes différente d’avant la pandémie, mais bien décidée à s’imposer. Tout le monde porte un masque, les vélos et les trottinettes ont gagné du galon, des distributeurs de gels sont disponibles devant chaque arrêt d’autobus. Je me suis empressée d’aller à l’atelier, un peu inquiète de devoir prendre le métro dont on disait tant de mal. En fait, le risque m’a semblé négligeable. Distanciation et port du masque respectés. Mais le quartier de La Motte-Picquet n’avait pas retrouvé sa déambulation rieuse et ses terrasses bourdonnantes. Les bars venaient de fermer à la suite du passage de l’Île de France en zone renforcée.

Le retour du soir en métro fut d’autant plus confortable que les employés du ministère des Armées semblent avoir été placés en télétravail et ce n’était plus la foule d’avant le Covid, la presse et la fatigue. Mais quelques jeunes et quelques récalcitrants ayant baissé leur masque sous le menton semaient un rien d’inquiétude.

Samedi matin, profitant d’un rayon de soleil, je suis allée faire un tour au Palais-Royal.  Malgré la sécheresse de l’été, les feuilles des tilleuls étaient particulièrement vertes. Se croient-elles au printemps ? La nature s’y perd.  Un homme allongé sur les dalles du pourtour travaillait ses abdominaux, un autre, élastique accroché aux grilles, ses pectoraux. Encore plus loin, des groupes s’agitaient de concert en mouvements venus d’Asie. Encore plus loin, sous les voûtes de la Comédie Française, des jeunes s’entraînaient à la boxe. Et je me suis souvenu que les salles de sport étaient fermées. De l’air et de la beauté, ils n’y perdaient rien. Une nouveauté, la présence des chiens. Durant le confinement, leurs promeneurs avaient bénéficié de certaines prérogatives, y avait-il un lien ? En tout cas, une bande de molosses déboulant du passage sous la maison de Colette manqua me bousculer. Jamais, je n’avais vu le jardin aussi animé un samedi matin.

En fin d’après-midi,  je suis revenue de l’atelier en métro. Une rame toutes les sept ou huit minutes, elles étaient bondées. Il est resté bloqué à Concorde durant un temps interminable. Une jeune fille a blagué dans un silence général : « Le train de l’horreur ! » Je me suis échappée et j’ai pris la ligne 1, automatique et plus fournie en rames, qui m’a déposée à la station Louvre. Je n’ai pas eu le courage de remonter la rue du Louvre à pied et j’ai sauté dans l’autobus 85. Il s’est rempli aux stations suivantes. Coincés dans un embouteillage, on était loin des conditions de sécurité affichées et clamées partout. Un jeune a toussé. Plusieurs personnes lui ont tourné le dos, ce qui a fait rire son amie. Pour le moment, peu d’entre eux ont vu des êtres aimés mourir de cette sale maladie.

Pendant ce temps-là, Trump contaminé (?) faisait le guignol à Washington pour affirmer que le virus était bénin et qu’il ne fallait pas en tenir compte.