Après le café, nous sommes partis tous les quatre en voiture pour faire un tour dans les environs. D’abord, dans les vignes toutes proches de Munet. Nous avons déambulé le long des vignobles prestigieux de Champigny, avec une pensée toute particulière devant la grille du fameux Clos Cristal. Arnaud nous raconta que la qualité du vin tenait beaucoup aux murs de pierres qui renvoient la chaleur au coucher du soleil. Puis il nous a conduits par des chemins de terre à une plantation de peupliers au bord d’une toute petite rivière. Il voulait nous montrer son travail contre les ravages des castors. En effet, chaque tronc était dépecé jusqu’à une hauteur de 80 cm environ. On imaginait l’activité durant la nuit de ces bêtes qu’on croyait cantonnées au Canada depuis belle lurette. Arnaud avait fini par entourer chaque tronc de grillage, précaire protection contre des bêtes aussi malignes qu’entêtées.

Nous sommes passés dans des villages dont les maisons de tuffeau brillaient doucement au soleil. Chaque maison possédait un élément d’architecture qui retenait le regard : un porche, un pigeonnier, une tourelle, une fenêtre à meneau, leur conférant une discrète allure de château. Ensemble dont l’harmonie nous rappelait que nous étions au cœur de la France, dans cette Touraine, dernier rempart aux agissements des Anglais lorsque Jeanne d’Arc  vint à Chinon (dont nous voyions au loin le nuage de refroidissement de la centrale nucléaire) pour redonner du courage à Charles VII !

Nous avons ensuite visité quelques églises romanes sur le coteau et au bord de la Loire. Hélas, le fleuve presque à sec ressemblait davantage ce jour-là à un oued qu’au ruban majestueux se lovant avec calme et sensualité entre des bancs de sable blond. Le flot de l’Indre à son estuaire n’était pas de trop pour lui redonner un peu de vitalité.

Nous avons tourné autour de l’abbaye de Fontevraud, abbaye mixte mais par statut dirigée par une abbesse de sang royal. Ancien pénitencier, aujourd’hui centre hôtelier-culturel. Mais il nous fallait rentrer, l’après-midi avait passé comme un éclair. Arnaud et Anne-Marie devaient aller chercher leur petite-fille à la gare de Saumur et il nous fallait rendre sa voiture à Julien, dans un Paris gelé par une gréve de métro. Nous nous sommes quittés devant la maison délicieusement dorée par le soleil, en jurant de nous voir plus souvent que tous les vingt-cinq ans.

Fin.