Il pleuvait des cordes, samedi dernier. J’ai pensé un moment que l’anniversaire d’Annick allait être annulé. Pouvait–elle recevoir une trentaine de convives à l’intérieur de sa petite maison près de Mortagne ? Finalement, nous nous sommes lancés de confiance. Arrivés dans le Perche, les nuages se sont  écartés et le soleil a éclairé les vallons, les prairies, les jolies maisons isolées de cette région que nous avions bien connue dans notre jeunesse pour y avoir acquis et emménagé vaille que vaille une petite ferme en ruine sur le bord d’une route vicinale.

A cette époque, nous habitions Paris et nous avions soif de nature. Ève avait dix-huit mois. Nous risquions notre vie tous les weekends sur une route à trois voies pour retrouver le silence de la campagne, le soleil sur le perron, les déjeuners dehors. La cheminée fumait, les murs suintaient d’humidité, mais nous aimions notre petite maison de Mont Clos. Par la suite, nous y avons passé quelques vacances plus longues. Mon frère Patrice avait acheté à un kilomètre de là le Chêne Vert, une jolie maison isolée, plus confortable et plus grande que la nôtre. Ce furent de bons moments, occupés à bricoler, à recevoir des amis, à nous promener dans cette magnifique région de Bellême et de sa forêt alentour.

Nous avons donc décidé d’y passer en pèlerinage. Après quelques difficultés pour retrouver le chemin, alors que je m’attendais au pire, je vis derrière une haie un toit qui ressemblait au nôtre, entièrement refait, recouvert de belles tuiles anciennes. Derrière le portail, c’était bien notre ancienne maison, pimpante, ses petits bâtiments adjacents en parfait état, ses granges aveugles de notre temps, aujourd’hui percées de fenêtres. Des enfants jouaient dans le jardin, une dame téléphonait devant le perron. Comme dans un rêve.

La femme m’a laissée entrer pendant que Gilles garait la voiture. L’intérieur était superbe : un grand salon, une grande cuisine où se tenir à vingt avec des éléments modernes, des chambres au rez-de-chaussée, un bel escalier de bois qui montait aux combles aménagés. Un palais par rapport à notre chaumière, où je reconnaissais cependant les portes que nous avions ouvertes, la salle à vivre qui nous servait aussi de chambre presque inchangée. La maison avait été restaurée dans la suite naturelle de nos travaux, que c’en était touchant.

On était en retard, nous sommes vite remontés dans la voiture et c’est le cœur content que nous avons laissé Mont clos à sa nouvelle vie, remplie d’enfants rieurs et d’adultes affairés.

Le soleil a encore brillé chez Annick, le temps des embrassades. Sa petite maison percheronne était plus vaste qu’il n’y paraissait et c’est au chaud que nous avons pu déjeuner avec le plaisir de se retrouver et de lui chanter au dessert un joyeux anniversaire, accompagné par le banjo de Lou